HERVE MARITON interprète “Le discours de Soljenitsyne à Harvard, sur le déclin du courage”

HERVE MARITON interprète “Le discours de Soljenitsyne à Harvard, sur le déclin du courage”

time 12 h 45 min

13 juin 2019

Discours de Soljenitsyne à l’Université de Harvard

Dissident russe, Alexandre Soljenitsyne s’est présenté devant la promotion 1978 de l’Université de Harvard dont il n’aurait pas pu être plus éloigné : les diplômés étaient là grâce à l’héritage, le génie, les privilèges ou l’influence. Soljenitsyne est arrivé à la cérémonie après le goulag, l’exil, la terreur et les privations. Il avait reçu le Prix Nobel de littérature huit ans auparavant et établi son domicile aux États-Unis. La promotion de 1978 s’attendait à une diatribe contre le communisme et un éloge de son pays d’adoption.

Mais ces mots ne sont jamais venus.

Soljenitsyne apportait un message différent :

La devise de Harvard est “VERITAS”. La vérité est rarement douce à entendre ; elle est presque toujours amère. Mon discours d’aujourd’hui contient une part de vérité ; je vous l’apporte en ami, non en adversaire…

Il est temps, à l’Ouest, de défendre non pas tant les droits de l’homme que ses devoirs.

Si l’on me demandait…  si je pouvais proposer l’Ouest, en son état actuel, comme modèle pour mon pays [la Russie], il me faudrait en toute honnêteté répondre non. Non, je ne prendrais pas votre société comme modèle pour la transformation de la nôtre…

Après avoir souffert pendant des décennies de violence et d’oppression, l’âme humaine aspire à des choses plus élevées, plus pures que celles offertes aujourd’hui par les habitudes d’une société massifiée, forgées par l’invasion révoltante de publicités commerciales, par l’abrutissement télévisuel et par une musique intolérable.

Comment l’Ouest a-t-il pu décliner, de son pas triomphal à sa débilité présente ?

Nous avons tourné le dos à l’Esprit et embrassé tout ce qui est matériel, avec excès et sans mesure. Le nouveau mode de pensée qui est devenu notre guide, n’admettait pas l’existence d’un mal intrinsèque en l’homme, et ne voyait pas de tâche plus noble que d’atteindre le bonheur sur terre.

Nous avions placé trop d’espoirs dans les transformations politico-sociales, et il se révèle qu’on nous enlève ce que nous avons de plus précieux : notre vie intérieure…

[Notre tâche sur terre] doit être l’accomplissement d’un dur et permanent devoir, de sorte que tout le chemin de notre vie devienne l’expérience d’une élévation avant tout spirituelle, pour que [nous] quittions cette vie en étant de meilleures personnes que lorsque nous y sommes entrés.

Seul un mouvement volontaire de modération de nos passions peut élever l’homme  au-dessus du courant du matérialisme…