CAHIER D’ESPÉRANCE N°879: 2ème Conférences de Carême 2018 : «L’engagement spirituel et les intuitions anticipatrices »

Frédéric Ozanam est une grande personnalité laïque du XIX° siècle (1813-1853): Il a vécu dans un monde en pleine mutation sociale et culturelle un peu comme le nôtre. Je l’ai découvert avec bonheur, au moment de sa béatification, en lisant sa correspondance abondante et passionnante qui recouvre 23 années de sa courte vie (quelques 1500 lettres). Il s’y révèle avec sa profondeur spirituelle, sa vie toute remplie de Dieu’ comme disait sa femme Amélie mais aussi avec ses jugements sur le monde nouveau en train de naître. Il a redouté et aimé tous ces changements et il a livré au jour le jour, à sa famille et à ses amis  ses intuitions qui allaient se révéler anticipatrices de la modernité et qui le rendent très proche de nous.

Mais d’où lui venait le regard curieux et aimant qu’il portait sur le monde ? De l’intensité et de la profondeur de sa vie de prière qui, jour après jour, dans une vie ordinaire, lui donnait une lucidité étonnante et, en même temps, cette tendresse qui a tant frappé ses contemporains. C’est ainsi qu’à 20 ans, il voulut montrer avec quelques camarades étudiants le lien entre foi et amour par l’attention portée aux plus pauvres, victimes d’injustices sociales ou simplement déshumanisés par la misère. Il fonda alors les ‘Conférences de charité’ qui deviendront la Société de Saint-Vincent de Paul, de type tout à fait nouveau pour l’époque. Puis, toute sa vie, il prit le parti des plus pauvres et s’engagea comme chrétien dans une œuvre de réconciliation sociale.

Il pensait que la foi chrétienne est d’autant plus vivante qu’elle se dit  pas seulement dans un milieu où elle est bien accueillie mais en plein vent du monde, confrontée à l’agnosticisme ou à d’autres expériences religieuses. Frédéric Ozanam a fait cette expérience comme universitaire mais, plus largement, il pressentait ce que serait le témoignage de foi dans un monde sécularisé.

Il a vécu sa profession comme une ‘vocation se voyant enseignant à la Sorbonne et chercheur non pas bien que croyant  mais parce que croyant. On voit que son métier n’était pas un à côté de sa vie spirituelle et de ses activités caritatives mais qu’il était le centre de gravité de sa vie.

Frédéric Ozanam ne serait-il pas un maître de vie pour notre temps ?

Mireille BEAUP

Docteur de l’Université Paris III,

Enseignante à l’Ecole cathédrale


        

N°879 Semaine du 21 au 28 février  2018

Vous pouvez télécharger le Cahier d’Espérance N°879 au format PDF: 2018 – 879