CAHIER D’ESPÉRANCE N°886 «Le Moinagement»

Ou l’art de manager selon Saint Benoît

Saint Benoît a vécu en Italie (480-547). Son époque est celle du Bas-empire romain, une époque qui a bien des ressemblances avec la nôtre. Aux troubles politiques et économiques,  à la fragilité des frontières, s’ajoutent corruption, non-respect de la vie à la naissance, mœurs chaotiques et coupure des élites avec les besoins et préoccupations du peuple.

En quelques siècles, les moines bénédictins renversent la donne et offrent à l’Occident un modèle de civilisation, d’harmonie et de paix.
Des principes simples organisent leur vie : une vie communautaire qui prend au sérieux celle de la première communauté chrétienne, une mise en commun des ressources et des compétences, une vie humaine qui se dilate dans un sens partagé et une vocation commune à chercher Dieu et servir les hommes.

Benoît écrit un bestseller : la Règle de Saint Benoît. Elle a traversé 15 siècles et inspire encore la vie quotidienne des moines et moniales bénédictines et cisterciennes sous toutes les latitudes. Elle est souvent commentée par des consultants et spécialistes d’organisation. Ses axes inspirent des voies pour sortir des crises de notre temps comme en témoigne le récent livre de Rod Dreher : « Comment être chrétien dans un monde qui ne l’est plus ? – le pari bénédictin».

Saint Benoît, au travers d’une vie très incarnée, propose une synergie entre des hommes désireux de sens partagé et de hauteur de vie et des responsables qui sont garants d’une visée commune et d’une authentique recherche de l’essentiel au cœur de l’important. Il en découle une organisation subtile alliant pouvoir et contre-pouvoir, une simplification des structures pour qu’elles servent sans cesse le sens et la visée de l’action, une vie tournée vers le service de la personne et du bien commun. Une éthique en découle qui favorise une harmonie sociale.

Cette vie respire, elle est irriguée, équilibrée, féconde. Elle a un centre que symbolise le puits des cloîtres romans : le Cœur du Christ, source de Vie et de Sagesse.

Vincent Lenhardt, consultant et le Père Hugues Minguet, moine
bénédictin, nous présenteront le « Moinagement ou l’art de manager selon St Benoît », au cours de la conférence-débat qui aura lieu à Notre Dame de Pentecôte le jeudi 12 avril à 12h45.

Venez nombreux ….
Et  invitez vos collègues !….


2°Conférence de Carême à Notre-Dame de Pentecôte

                                                 22 février 2018                                                         

VIE SPIRITUELLE ET INTUITIONS NOVATRICES DE FREDERIC OZANAM

par Mireille BEAUP

Agrégée d’Italien. Docteur de l’Université Paris III. Enseignante à l’Ecole Cathédrale

(Suite et fin)

F.Ozanam soutient la révolution de février 1848 : « Derrière la République qui n’occupe guère que les gens lettrés, il y a les questions qui intéressent le peuple, pour lesquels il s’est battu :les questions du travail, du repos, du salaire. Il ne faut pas croire qu’on puisse échapper à ces problèmes. » F. Ozanam connait à cette période deux échecs publics : on lui demande de se présenter à Lyon pour devenir député de la Constituante, mais il n’est pas élu. Puis il crée un journal avec le Père Lacordaire : l’Ere nouvelle, mais le journal ne marchera pas plus d’un an, car l’opposition au sein du monde catholique est trop forte. Il était trop en avance sur son temps. « Tout donne lieu de croire que les principes propagés par l’Ere nouvelle (la démocratie, la liberté des peuples, la lutte contre la misère…) germeront en silence et que nos efforts trouveront des continuateurs meilleurs que nous. » 

LES INTUITIONS NOVATRICES DE L’ENSEIGNANT CHERCHEUR

F.Ozanam a toujours pensé que l’enseignement et la recherche constituaient sa véritable vocation et que sa place était dans sa chaire de professeur de littérature à la Sorbonne. Il y a été nommé comme suppléant après son succès à l’agrégation en 1840 et, après sa titularisation, il l’occupera jusqu’à sa mort en 1853.

Dans ce domaine, Ozanam se pose principalement 3 questions :

Peut-on réconcilier l’amour des lettres et le désir de Dieu ?

Lors de son Doctorat de Lettres, il consacre sa thèse à « Dante et la philosophie catholique du XIIIème siècle. » Ozanam s’appuie sur La Divine Comédie, récit d’un itinéraire de salut, inspiré par la théologie de l’époque. Il nous montre comment la poésie, la philosophie et l’histoire sont saisies dans un réseau de charité. Les lettres et les études profanes ne sont pas ennemies de la sainteté. Ozanam a mené une carrière à la Sorbonne à l’époque de la polémique entre l’Université d’Etat et l’Eglise. Mais chaque fois qu’il avait une décision à prendre, il s’en remettait à la prière pour favoriser son discernement.

La profession peut-elle être pour un chrétien un lieu de vie et d’épanouissement ?

Son métier n’est pas à côté de sa vie spirituelle et de ses activités caritatives, mais elle est le centre de gravité de sa vie. Le Cardinal Vingt-Trois a expliqué dans une conférence donnée aux journées Ozanam en 2013 : « Il ne pratique pas sa spécialité dans une sorte de  schizophrénie mentale, en se voyant chercheur et enseignant bien que croyant, mais au contraire s’adonnant à la recherche et à l’enseignement parce que croyant. » En effet, il voyait toutes les réalités humaines prises dans l’amour de Dieu. C’est vrai de toute profession, mais comme son métier était celui d’enseignant chercheur, il pensait qu’il pouvait aimer Dieu, non seulement de toute sa force, de tout son cœur mais aussi de toute son intelligence, en ouvrant ses auditeurs ou ses lecteurs à des connaissances qui les feraient vivre.

De plus, lorsqu’il est nommé à la Sorbonne, c’est encore pour faire du nouveau : on lui propose de remplacer Claude Fauriel qui avait créé en 1830 un cours de littérature étrangère très original puisqu’il voulait montrer comment les civilisations méridionales avaient autant d’importance que les civilisations germaniques dans la formation de l’Europe. Ce qui était assez perturbant à l’époque. De même, Ozanam insistait sur l’importance de l’apprentissage des langues pour lire les textes originaux. L’histoire des peuples européens le passionnait. Il était convaincu du rôle civilisateur du christianisme. « Je me renferme dans mon métier d’historien et de critique et le fais chrétiennement c’est-à-dire franchement, c’est-à-dire que j’y porte mes convictions et que je ne les cache pas. »

Peut-on réconcilier la science et la foi ?

(question très neuve en plein XIXème siècle, mais pertinente aujourd’hui)

Le professeur Ozanam fondait son enseignement sur une recherche très rigoureuse qu’il qualifiait de scientifique. De plus il écrit : « Les écrivains chrétiens (et tous les savants) savent qu’il n’est permis ni de négliger, ni de dissimuler une vérité si petite, si profane, si embarrassante qu’elle paraisse. » Il ajoutera dans un discours prononcé au Cercle catholique en 1843, sans craindre d’être complètement à contre-courant de ce que l’on pense alors : « Il est bon que les laïques retournent à l’humilité de leurs fonctions, philosophes, archéologues, naturalistes et qu’ils veillent à cette part de vérité qui est leur domaine. Il faut qu’ils servent l’Eglise en faisant chrétiennement leur métier de savants. »

Ozanam contribue ainsi à ouvrir le monde catholique de son temps à la réconciliation de la science et de la religion, de la foi et de la recherche, de la liberté et de la vérité.

Frédéric Ozanam nous aura laissé un modèle de fidélité dans la vie spirituelle, d’une charité dynamique avec la fondation de la société Saint-Vincent de Paul, d’innovation sociale, notamment avec ses réflexions sur un code du travail à venir. Il propose également une réconciliation de la science et de la foi. Tout cela fait de lui aujourd’hui un compagnon de route et un maître de vie.

     Compte-rendu d’Anne Plauchu


Expostion de sculptures et peintures

Du 11 avril au 22 mai

Christine Metzler et Sophie Pénicaud

LAUDATO SI

« […] la nature est une source constante d’émerveillement et une révélation continue du divin. » (Laudato Si chap. 2- IV, 85)

Dans cette perspective, Sophie Pénicaud propose, par ses peintures, collages, gravures, de toujours plus nous émerveiller devant la Création et Christine Metzler a voulu, avec ses sculptures, mettre en image le poème de Saint François.

« […]  En regardant ces vastes étendues de nature presque vierge, on entre en présence d’une profondeur qu’elle a contemplée. Elle parle, dans ses paysages, et bien au-delà d’eux, de la présence, dans ce monde créé, de ce qui est présence spirituelle, et qui se donne à voir.  […]

Elle a sa palette, son graphisme. Toujours, tels les doigts des deux mains qui s’enlacent, ses paysages unissent en eux-mêmes l’intime qui travaille son âme.  Sophie Pénicaud fixe un horizon et questionne la vie. Il y a une rime entre ses ciels et ses terres ou ses eaux mêlées. Que fixe-t-elle dans cette interface qui nous introduit dans ce fond qui revient toujours vers nous ?

Sa peinture se donne dans son mystère, emprunt de rigueur et de poésie, de franchise et de retenue, avec  ses particularités, son œuvre capture le regard et nous entraîne ; elle est intemporelle. »

Christine CHELINI – Historienne de l’Art,  Artiste plasticienne

« Le cantique des Créatures est d’abord un grand élan de louange, tourné vers le Très Haut, vers Celui qui est toujours au-delà et que nul ne peut nommer. Cet élan s’ouvre soudain à la communion fraternelle et émerveillée avec toutes les créatures. »

Eloi Leclerc  « Le Cantique de Frère Soleil »



 

N°886Semaine du 11 au 18 avril  2018

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Vous pouvez consulter le dossier bioéthique du site du diocèse de Paris en cliquant sur le lien ci-dessous:

paris.catholique.fr/bioethique