CAHIER D’ESPÉRANCE N°851 : «Intelligence du travail»

Pierre-Yves_Gomez (2)Pierre – Yves Gomez, créateur du parcours Zachée,  auteur du «Travail invisible», présentera le 11 mai son nouveau livre :

« Intelligence du travail »*

Il y soutient essentiellement que l’homme moderne souffre d’un divorce entre sa condition de travailleur et sa condition de consommateur.

Le paysan consommait ce qu’il produisait, d’où le  sens vital de son travail, la limitation de sa consommation à son effort et l’entretien de son environnement.

Devenu travailleur salarié, il a perdu la maitrise et  le sens de ce travail dont l’utilité et le contenu sont définis par d’autres que lui : le chef d’entreprise, le marché, les prescripteurs de normes.
Contraint par la mécanisation, par les procédures, par l’unique  objectif financier, il se ressent rouage anonyme et ne sait plus pourquoi il travaille.

Pour lutter contre sa démotivation, les primes ne suffisent pas et certains chefs d’entreprises développent la subsidiarité, la connaissance de l’utilité du travail, la participation à son contenu.
La motivation reste toutefois inférieure à celle du travailleur indépendant.

L’identité et le lien social dans un pays résultent d’abord de l’existence d’un « travail ensemble ».

Deux cités s’affrontent, celle du travailleur qui trouve sa dignité en donnant un sens communautaire à l’utilité de son travail et celle du consommateur qui veut jouir et faire admirer son avoir sans limite, même au détriment des ressources de la planète.
L’encyclique « Laudato Si » dénonce cette surconsommation, alors qu’un philosophe post moderne come Michel Foucault exalte même la consommation de soi-même.

La consommation est devenue le seul objectif de l’économie.

Les politiques devraient prendre conscience que le divorce avec« la France d’en bas » vient d’abord de ce que les travailleurs ne se sentent pas reconnus.

Mais voici que  l’entreprise néolibérale ne salarie plus mais utilise des auto-entrepreneurs extérieurs. Elle ne se reconnaît plus comme une communauté de travail mais comme une plateforme de compétences individuelles.

* Pierre-Yves Gomez, Intelligence du travail, Desclée de Brouwer, 2016, 184 p.

Pourtant, certaines de ces nouvelles formes de travail ne rendent-elles pas plus de dignité au travailleur ? N’est-ce pas le cas du  travail gratuit assuré par le client ou des contributions gratuites comme pour Wikipédia, de l’économie de proximité, des plateformes d‘information d’auto-entrepreneurs sous réserve qu’ils les gèrent collectivement, des « fablabs », ces ateliers d’usage collectif de robots produisant des objets personnalisés ?

Beaucoup de ces réflexions seront abordées et expliquées par Pierre-Yves Gomez lors de sa conférence, le jeudi 11 mai à 12h45,  à Notre Dame de Pentecôte.

Jean Paul Lannegrace


 4ème Conférence de Carême

 le jeudi 23 mars 2017

 par Bénédicte LUCEREAU,

  médiatrice conjugale et thérapeute au Cabinet Mots Croisés. 

COMMENT RETABLIR LA CONFIANCE DANS LE COUPLE ?

(1ère Partie)

Il n’y a pas de couple sans croix, mais la résurrection est possible après la croix (la crise).

«Comment passer de la défiance à la confiance ?» La question est difficile dans une société et à une époque où le mariage est discrédité, la parole donnée et reprise, la fidélité assumée par tranches de vie successives et le divorce banalisé ?

En consultation, nombreux sont ceux qui demandent comment savoir s’ils ont choisi le bon, comme si existait celui qui me rendrait heureux (se) comme dans un conte de fées.

Aujourd’hui, on assiste à une crise de l’engagement, la liberté étant conçue comme la possibilité de conserver toutes les possibilités de choisir. Telle n’est pas la conception chrétienne de la liberté.

Lors de la crise conjugale, celui ou celle, dont j’attends le plus, est celui-là même qui me fait le plus souffrir. Il y a alors perte de confiance en l’autre, en soi, en la vie, voire en Dieu. Le risque est le repli, le déni, les reproches sans fin. La tentation est grande alors de refuser d’affronter la crise pour ne pas se remettre en question et d’aller voir ailleurs.

L’étymologie grecque du mot crise est croissance et la crise survient quand on est provoqué à évoluer et à dépasser un stade. Nous pouvons en effet lire dans « Amoris laetitia » que toute vie est un chemin de croissance. «Nos couples sont en croissance quand Dieu élève notre amour sensible à la hauteur de l’amour divin ou d’un amour de communion (agapé) ».

Comme l’écrit le Pape François : « Une crise surmontée conduit à améliorer, affermir et mûrir le vin de l’union… l’amour est artisanal ».

Aimer, c’est se donner de façon équilibrée et juste, c’est un engagement à se donner et à recevoir, à être fidèle à soi-même et à la parole donnée. Le sacrement de mariage n’est pas une fin en soi, il nous mène vers Dieu.

Si le mariage n’est qu’un contrat entre deux personnes, dès lors que l’un ou l’autre ne ressent plus rien pour l’autre, le contrat peut être rompu. En réalité, le sacrement est alliance.

Aujourd’hui, l’émancipation de la femme (vie professionnelle, contraception…) modifie le partage des rôles au sein du couple dans le sens d’une plus grande confusion. On assiste même parfois à une lutte pour le pouvoir au sein du couple. Dans ce contexte, les couples doivent être particulièrement vigilants quant à la qualité de la relation.

QUELLES SONT LES CRISES PERSONNELLES A DEPASSER ?

Chacun traverse des crises de croissance psychologique. Devenir adulte, c’est passer par des crises, séparations, deuils, sans oublier la découverte par le sujet de son identité.

L’enfant doit se séparer de sa mère car toute fusion est mortifère. Il faut arrêter d’attendre que l’autre me comble (c’est d’ailleurs l’illusion de la passion amoureuse).

Le travail d’individuation se fait au fil du temps. Il est écrit : « L’homme quittera son père et sa mère ». L’adulte doit renoncer à ce que son conjoint lui apporte ce que ses parents ne lui ont pas donné.

Certains enfants vivent une autre crise avec l’arrivée du petit frère ou de la petite sœur et ils doivent découvrir qu’ils sont aimés de façon personnelle. Toute comparaison est mortifère, y compris au sein du couple.

La crise de milieu de vie (45 à 55 ans), quant à elle, est redoutable pour le couple. La personne a l’impression que ce qu’elle a construit est mauvais…que son couple n’est pas celui qu’elle désirait. C’est une véritable crise d’identité comme celle de l’adolescent. Notons que, dans beaucoup de cas, ces crises de croissance peuvent se passer de façon naturelle.

CRISES DANS LE COUPLE

Le lien conjugal se distingue du lien amoureux par cette capacité à surmonter les crises, car la crise n’est pas un échec et la vie conjugale est jalonnée de crises.

Il y a tout d’abord la crise de la sortie de la fusion amoureuse, il s’agit d’apprendre à faire un, tout en étant deux. Puis le couple passe par l’acceptation des différences de chacun, l’enjeu est d’aimer un être inscrit dans une histoire et qui évolue.

Le Pape François parle de la «danse du couple», il s’agit de co-évoluer avec son conjoint sans jamais s’arrêter de danser.

A l’arrivée du premier enfant, il convient que chacun respecte la façon de faire de l’autre et que la femme ne devienne pas plus mère qu’épouse.

Les étapes à passer sont aussi celles où il est question de fécondité et de sexualité, sans oublier l’adolescence des enfants qui est souvent un tremblement.

Certains couples connaissent l’épreuve du chômage, de la maladie et du deuil.

Il ne faut pas négliger non plus dans la vie des couples, les nombreuses blessures de routine, déception, colère et la tentation d’aller «voir ailleurs».

Pour finir, le couple est confronté à la crise qui peut survenir au moment de la retraite,avec le départ des enfants, le nid est vide, la femme connait la ménopause et les parents des conjoints décèdent souvent dans cette même période.

De toutes ces éventuelles crises, pourra surgir la crise du désamour et de l’infidélité.

Il nous faut ouvrir les yeux et nous demander si Dieu ne veut pas me dire quelque chose pour me rapprocher de lui, pour nous rapprocher de lui. Chacun est coresponsable de la crise, d’une certaine façon, les deux conjoints ont raison de penser ce qu’ils pensent…

A suivre…

Notes de Anne Plauchu


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 N°851 Semaine du 10 au 17 mai 2017

Vous pouvez télécharger le Cahier d’Espérance N°851 au format PDF : 2017 – 851